Lib'ailés!
Rodolph Balej
Les amateurs de poésie devraient butiner les guides d'identification qui recèlent de noms d'animaux ou de plantes aux consonances surprenantes tout autant qu'inusitées. Voici quelques-uns des trésors linguistiques que je vous ai dénichés : l'ophiogomphe saupoudré, le cordulégastre oblique, la cordulie ceinturée, l'aeschne constrictor, l'épithèque à queue de beagle, le gomphe-cobra, l'argie svelte, le leste à forceps, la célithème indienne, l'érythrodiplax côtier, le sympétrum éclaireur, le caloptéryx à taches apicales, la nannothème d'elfe, la demoiselle bistrée, la courtisane d'Amérique, la déesse paisible, la leucorrhine frigide, la pantale flavescente... et sachez que je me suis retenu de vous en offrir davantage! Au fait, avez-vous deviné quelles créatures se cachent derrière ces appellations à faire tomber en pâmoison les fans de science-fiction? Des odonates! L'ordre des odonates - terme signifiant littéralement "mandibules munies de dents" - rassemble 138 espèces au Québec parmi lesquelles 101 libellules et 37 demoiselles. Certaines arborent de curieux motifs sur les ailes. Ainsi, la magnifique traméa lacérée (Tramea lacerata) a des tâches en forme de sacs de selle (d'où sa dénomination anglaise "Saddlebags") qui lui procurent de l'ombrage, réduisant de la sorte la dessiccation lors des journées ensoleillées. L'espèce affectionne les eaux calmes ou stagnantes des lacs, étangs et mares sans poissons susceptibles de dévorer ses oeufs. Cet élégant planeur "mousticophage" est largement répandu aux Ãtats-Unis ainsi qu'en Ontario. Par contre, il est très rare au Québec et n'aurait été mentionné qu'à quelques reprises dans l'extrême sud. Il se pourrait que le réchauffement climatique favorise sa propagation vers le Nord, aussi ouvrez bien grands les yeux, vous pourriez avoir la chance de le rencontrer un jour en nature!