Son altesse sérénissime
Rodolph Balej
J'ai toujours pensé que la mouette de Bonaparte (Chroicocephalus philadelphia) avait été appelée ainsi en l'honneur de Napoléon III, qui fut le dernier monarque de France et le premier président de la République française. Il n'en est rien même si son nom réfère bel et bien à la famille impériale! De fait, ce nom commémore l'éminent prince Charles Lucien Jules Laurent Bonaparte (1803-1857) - neveu de l'empereur Napoléon III - qui fut l'un des zoologues les plus célèbres de son époque. On lui doit notamment la description de l'étrange famille des monotrèmes, ces mammifères qui pondent des oeufs et allaitent leur progéniture, dont le plus populaire représentant est l'ornithorynque. Charles Lucien Bonaparte vécut quelques années à Philadelphie. Il mit à profit son séjour pour publier plusieurs ouvrages sur l'avifaune nord-américaine, notamment "American Ornithology", en 1825, et "Ornithology of the North America", en 1826. Il fut le premier à décrire la mouette de Bonaparte. Deux caractéristiques la distingue des autres espèces apparentées : d'abord, elle ne niche pas en colonie mais en couples isolés ; ensuite, elle établit son nid dans un arbre - généralement un résineux - et non pas à même le sol comme ses congénères. Au Québec, la mouette de Bonaparte nidifie dans le nord de la forêt boréale, aux abords des lacs, des marécages et des tourbières. Durant la migration d'automne, elle abonde dans la vallée du Saint-Laurent avant de s'éclipser en direction du Sud, le long ou au large des côtes étasuniennes, où elle passe l'hiver. Elle se nourrit surtout d'insectes au printemps et, le reste de l'année, de petits poissons, de krill, de mollusques et crustacés marins. Son altesse a l'âme voyageuse et des goûts éclectiques!