Dessine-moi un ciel étoilé

Nelson Boisvert

« Qui a volé mon ciel étoilé? » s'écria le petit Prince assis sous le réverbère... De fait, depuis une quarantaine d'années, la lumière induite par l'éclairage urbain (lampadaires, enseignes publicitaires, vitrines de magasins, bureaux allumés en permanence...) voile nos ciels nocturnes et masque la voie lactée et les étoiles. Les images satellites mettent en évidence que l'agglomération de Québec génère une pollution équivalente à celles de Boston, Montréal et New-York beaucoup plus peuplées. À notre latitude, le phénomène semble amplifié par le couvert de neige qui favorise la réflexion de la lumière artificielle vers le ciel au lieu de l'absorber. Bien que ce phénomène soit relativement récent et peu documenté, les chercheurs estiment que les impacts de la pollution lumineuse sur les écosystèmes et la santé publique sont des plus préoccupants. Voici trois exemples parmi tant d'autres : une tour de 300 mètres, éclairée durant la nuit, tuerait en moyenne 400 oiseaux chaque jour (le nombre d'oiseaux tués chaque année aux États-Unis étant estimé à 100 millions) ; la pollution lumineuse est la deuxième cause de disparition des insectes nocturnes et pollinisateurs ; la lumière nocturne perturberait la production de mélatonine, l'hormone dite du sommeil, ce qui pourrait favoriser le développement de certains cancers. Au Québec, la pollution lumineuse a considérablement augmenté ces dernières années au point que les activités de l'ASTROLab du Mont-Mégantic, le plus important observatoire d'astronomie de l'est de l'Amérique du Nord, en étaient affectées et risquaient, à terme, d'être menacées. Grâce à la mise en oeuvre d'un « Projet de lutte contre la pollution lumineuse » conduit de concert avec la ville de Sherbrooke et les municipalités périphériques, la situation s'est beaucoup améliorée et la région s'est vue décerner, en 2007, le prestigieux (et novateur!) statut de « réserve internationale de ciel étoilé »... voilà qui ravirait le petit Prince!